La pêche en Méditerranée : plongée au cœur de sa crise la plus profonde des deux dernières décennies

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La mer Méditerranée n’est pas qu’une étendue d’eau salée. Elle est un symbole de vie, un sanctuaire de liberté pour les pêcheurs, et un pilier économique pour d’innombrables familles. Aujourd’hui, du pêcheur au poissonnier, en passant par les criées et les rares transformateurs locaux, la filière pêche en Méditerranée, singulièrement en Occitanie, se trouve confrontée à un dilemme sans précédent. Elle traverse, à notre grande affliction, sa plus grande tempête depuis ces vingt dernières années.

Les vagues incessantes de l’inflation, tant pour le carburant que pour les matières premières essentielles, telles que les filets et équipements, ébranlent la stabilité de notre activité.

Mais au-delà de ces défis économiques et environnementaux, se cachent des enjeux politiques. Le plan de Gestion West Med, mis en œuvre en 2019 avec de nobles intentions, a causé le retrait de 13 chalutiers sur la Façade, « saignant » le port de Sète à vif.

Au milieu de cette tempête, l’horizon semble aussi brumeux qu’une journée d’entrées maritimes, sans vision à moyen terme pour rassurer notre filière. Cette incertitude, couplée à des régulations qui semblent détachées des réalités maritimes locales, décourage nos mareyeurs. Pêcher devient vain si sa valorisation et son commerce deviennent non rentables. Plusieurs acteurs envisagent déjà de céder à l’appel de l’importation, mettant de côté nos criées locales.

Les paroles du Ministre Hervé Berville pourraient nous donner espoir. Mais à Sète, elles résonnent comme des échos lointains, déconnectés de notre réalité maritime. Nos appels pour le soutien au carburant restent sans réponse. Les débats sur la modernisation et les biocarburants, bien que séduisants, semblent être de lointains mirages.

À l’instar d’Ulysse luttant contre l’envoûtement des sirènes durant son périple de « l’Odyssée », nous sommes tentés par des promesses alléchantes des 450M€ sur 10 ans de la taxe éolienne. Cependant, ces chants séducteurs semblent bien dérisoires face aux impératifs imposés par les contraintes nationales et européennes des aides publiques.

Nous, pêcheurs, ne nous contentons pas de dire que nous nous sentons abandonnés. La réalité est là : nous sommes délaissés au nom d’une vision environnementale et d’une transition énergétique qui semble ignorer notre réalité. Pourtant, nous aspirons au changement, souhaitant innover pour pêcher avec responsabilité et vendre avec qualité. Mais comment avancer lorsque nos outils ont presque l’âge d’une vielle Peugeot 205 ? (plus de 30-35 ans de moyenne d’âge).

Nous implorons un soutien tangible, une oreille attentive, et un dialogue sincère. La coopérative des pêcheurs de Sète, avec sa richesse historique et sa passion, en appelle à une action résolue pour préserver notre filière.

La Méditerranée, c’est notre héritage, notre foyer, notre avenir. Nous ne quémandons pas l’impossible, mais une reconnaissance et un soutien véritable dans ces moments de tourmente.

Il est impératif que ceux aux commandes saisissent l’urgence et collaborent main dans la main avec nous, acteurs engagés, pour redonner à la pêche en Méditerranée le statut qu’elle mérite en tant que joyau de notre patrimoine.

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